Dans tout le Maroc, on peut trouver des poteries magnifiques, de diverses formes et couleurs. Lorsqu’on manipule ces céramiques, on peut souvent y voir inscrit, au dos, « Safi » ou « Asfi », leur lieu d’origine. Cette ville est en effet devenue le chef-lieu de la poterie marocaine.
Bleu, vert, jaune, orange, rouge, rose, violet, des paillettes, des dorures… Luisant au soleil et brillant à la lumière des bougies, les céramiques rayonnent dans la ville de Safi. Il suffit de déambuler dans la médina, pour découvrir de véritables « cavernes d’Ali Baba » qui regorgent de poteries luxuriantes ! Les voûtes blanches sont décorées de larges plats ornés. De l’eau ruisselle dans de superbes fontaines en terre cuite. Les tajines s’entassent avec les plats et les assiettes, les vases et les pichets foisonnent, les tasses et les cendriers fourmillent… Dans les ruelles, il en existe de toutes les formes, de toutes les couleurs, avec tous les motifs inimaginables, avec des ornements traditionnels marocains, berbères, ou bien même kitchs (des coeurs avec des paillettes par exemple). La quantité de poteries est impressionnante, et le choix est immense.
De par sa beauté, sa qualité et son abondance, la poterie safiote* a acquis une réputation internationale, et se vend parfois à prix d’or à Marrakech ou en Europe. Pourtant, tout le monde semble oublier d’où viennent ces trésors… Loin d’être touristique, la ville de Safi abrite un grand nombre d’artisans potiers vivant bien modestement, et qui continuent de transmettre leur précieux savoir-faire. Les artisans et les marchands d’Asfi proposent des oeuvres aux tarifs vraiment modiques. Certes, il faut parfois négocier pour des pièces importantes, mais les prix seront toujours bien plus intéressants qu’ailleurs. En effet, pour donner une idée, il faut généralement compter environ 10 dirhams (= à peu près 1 euro) pour une petite pièce de poterie (comme une tasse par exemple), et environ 50 dirhams pour un plat. Les sites de production majeurs de la région se situent à la Colline des potiers, la vallée Chaâba, le village de Sidi Abderrahmane et la commune Saâdla. Dans le centre ville de Safi, la fameuse Colline des potiers, qu’il est possible de visiter, comprend plus de 700 artisans, et 42 ateliers équipés de 72 fours traditionnels et de 27 fours à gaz.
En errant dans une ruelle de la médina, je rencontre par hasard Zidane, un potier safiot barbu et souriant. Ses mains et ses vêtements usés sont tachés d’argile ocre et blanche. Accueillant et sympathique, il m’invite à prendre le thé dans son minuscule atelier : il faut s’accroupir pour y entrer. Dans une vieille boîte de conserve rouillée, il fait bouillir l’eau du thé sur le feu, tout en me présentant ses œuvres. Certaines poteries sont d’une somptuosité et d’une ingéniosité remarquables ! Je suis surprise, par exemple, en découvrant que l’œuf orné de détails géométriques, peut en vérité s’ouvrir, et s’utiliser discrètement comme une boîte à secrets ! Je m’émerveille devant ces poteries, tout en dégustant des ghoribas* avec le thé sucré, et en écoutant les méthodes de fabrication de l’humble potier Zidane.
Que de beautés artisanales qu’on aurait envie d’embarquer avec nous… Mais la céramique est lourde, fragile et encombrante… Ce n’est pas très compatible avec nos vies nomades en sac-à-dos ! Dommage… Mais heureusement, il existe même de toutes petites tasses et des bols minuscules !
Mathilde Pichot
* Ghoriba : pâtisserie orientale, sorte de biscuit sablé
** Safiot.e : originaire de la ville de Safi
En savoir plus :
Le plus grand Tajine du monde… à Safi !
A Safi, la ville de la poterie, on trouve aussi le plus grand Tajine de boulettes de sardines du monde ! Son couvercle atteint les 6,30 mètres de diamètre et 4,5 mètres de hauteur.
Réalisé par les artistes potiers de la ville, l’immense tajine a été inauguré le samedi 10 juillet 1999, à Safi.
On peut l’admirer sur la place Mohamed V, dans le quartier du « plateau ».